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11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 00:02

27 Août 1986

Sidwaya du 29 août

L’honneur que nous fait aujourd’hui le leader de la révolution nicaraguayenne, de nous rendre visite au Burkina Faso est un événement d’une grande portée politique. Comme vous le savez, le Nicaragua est fort éloigné de notre pays aussi bien géographiquement qu’historiquement. Et pourtant, malgré les milliers de kilomètres qui nous séparent, malgré le handicap de la langue, malgré les différences de la culture, voici parmi nous le camarade Daniel Ortega, président de la République révolutionnaire du Nicaragua. Saluons le camarade Ortega.

Camarade président :

Permettez-moi tout d’abord, au nom du peuple burkinabè et au mien propre, de vous souhaiter la bienvenue à vous ainsi qu’à la délégation qui vous accompagne, en terre libre africaine du Burkina Faso. C’est avec un sentiment de fierté et de joie que le peuple burkinabè et moi-même vous accueillons aujourd’hui.

Camarade Ortega :

A ceux qui s’interrogeraient sur l’intérêt que le Nicaragua et le Burkina pourraient avoir en commun, je répondrais qu’au-delà des océans, au-delà des mers et des continents, nos deux pays ont le même idéal de paix, de justice et de liberté pour les peuples et entendent unir leurs forces pour défendre et sauvegarder cet idéal à un moment où l’impérialisme déploie avec arrogance ses tentacules. De plus, tout un réseau de liens et d’intérêts divers nous unit, que ce soit en tant que pays en voie de développement, à cause de notre appartenance au Groupe des 77 et des Non-alignés ou en tant que nations ayant choisi la voie de la liberté et de la dignité.

Camarade président :

Ni le Nicaragua, ni le Burkina ne peuvent se permettre d’accepter la division manichéenne qui veut que celui qui ne fait pas allégeance à l’Ouest travaille à l’Est. Nous pays Non-alignés estimons que la politique des blocs est néfaste à la paix mondiale. Nous n’acceptons d’être ni les arrière-cours des pays de l’Ouest ni les têtes de pont de l’Est. Bien que nous acceptions de coopérer aussi bien avec l’un qu’avec l’autre, nous réclamons le droit à la différence.

Mais qu’on n’attende pas de nous que nous soyons les spectateurs indifférents d’un match que se livreraient les grands, nos intérêts les plus primordiaux leur servant de ballon. Nous sommes, nous aussi, des acteurs de la vie internationale et nous avons le droit de choisir le système politique et économique le plus conforme à nos aspirations et le devoir de militer pour un monde plus juste et plus pacifique, bien que nos États ne possèdent ni grands cartels industriels ni arsenal nucléaire.

C’est pourquoi, camarade président, vous et moi, aux côtés de nos peuples, avons choisi de condamner le colonialisme, le néocolonialisme, l’apartheid, le racisme, le sionisme et toutes les formes d’agression, d’occupation, de domination et d’ingérence étrangère d’où qu’elles viennent.

Nous condamnons et luttons contre l’apartheid en Afrique du sud tout comme le sionisme en Palestine ; nous protestons contre l’agression ion au Nicaragua tout comme celle perpétrée contre la Libye et s de la Ligne de front ; nous dénonçons l’invasion de la Grenade tout comme l’occupation de la Namibie. Nous ne cesserons de le faire tant que justice ne sera pas rendue à ces peuples’.

Qu’est-ce qu’est le Nicaragua, pour nous ? Dire que c’est un pays d’Amérique ne suffit pas. Ce serait même masquer par omission impardonnable la vérité. Le Nicaragua, c’est d’abord quatre siècles de la plus rude des colonisations, cent ans de lutte de coteries pour le partage des dépouilles, cinquante ans d’une dictature cupide et sanglante. Le Nicaragua, c’est la lutte contre la domination, l’exploitation et l’oppression. C’est la lutte contre la domination étrangère ; c’est l’affrontement direct à ciel ouvert contre l’impérialisme et ses suppôts locaux.

Contre cet esclavage, il y avait, il y a, il y aura toujours ces hommes, ces femmes, ces enfants. Ils sont près de trois millions. Contre l’humiliation, il y a ces marxistes, ces intellectuels, ces paysans, ces croyants, ces non-croyants, ces bourgeois et ces riches qui aiment leur patrie. Il y a aussi les pauvres. Tous sont des companeros combattants. Ils luttent et meurent pour un même idéal, inscrivant dans le grand-livre d’histoire de l’Amérique latine, les pages les plus belles parmi les plus nobles.

Des millions d’enfants sont morts aux combats, des femmes sont tombées après avoir été torturées et violées, des combattants ont été fauchés, des prêtres ont interrompu la messe pour repousser les ennemis du peuple à l’aide de la Kalachnikov qui, alors, a craché le feu au nom de l’évangile progressiste.

Camarades, comme il est difficile d’être libre !

Chers frères du Nicaragua, nous comprenons les souffrances de votre chair, celles de votre âme. Oui, il y a des pays que la chance ne visite pas. Triste Nicaragua, si loin de Dieu et si près des Etats-Unis. Oui, dans ces conditions, il est difficile de naître et de vivre libre.

Mais les héros meurent debout. Ils ne disent jamais qu’ils meurent pour leur patrie. Ils meurent simplement. Et leur sang fertilise le sol de la révolution. Ainsi Sandino a versé son sang et la révolution sandiniste a triomphé un jour d’été 1979. Le Front sandiniste de libération nationale conduit victorieusement la lutte du peuple nicaraguayen. Et le 19 juillet 1979, Dieu est passé par le Nicaragua. Le monde entier a salué cette aube nouvelle. Les Etats-Unis aussi. Il ne suffisait pas de naître ; il fallait vivre. Qu’il est difficile de vivre libre !

Fallait-il que la fête du peuple nicaraguayen soit perturbée, assombrie par tant d’hostilités ?

On a vu avec le Nicaragua une situation explosive en Amérique latine. Les machinations commencèrent. On parla d’abord d’appel à la raison, puis ce furent des rumeurs de négociations qu’étouffèrent les menaces et les invectives, une opinion nord-américaine troublée, divisée. On dénonça le régime nicaraguayen comme marxiste-léniniste et on cria au nouveau Cuba. Ce fut la campagne de discrédit contre le Nicaragua. On le qualifia de dictature, on lui inventa des opérations de déstabilisation de ses voisins, en prétendant qu’il était manipulé de l’extérieur pour justifier la haine.

Alors se réveillèrent les Somozistes et leurs gardes, ceux que là-bas on nomme las bestias, los perros, c’est-à-dire, les bêtes, les chiens. Ils furent fortement aidés à coups de dollars. Des pays-frères et voisins les abritèrent, les entraînèrent, les équipèrent. On institutionnalisa la contre-révolution. Et voilà les contras une race nouvelle de carnassiers de la terreur.

Puis parfois, de temps en temps, l’on constata une accalmie. L’on espéra qu’elle s’éterniserait. Mais le feu continua de couver, puis se déchaîna de nouveau.

Vivre libre, espérer seulement un avenir meilleur, ce n’est pas facile quand on est Nicaraguayen. C’est pourquoi le peuple burkinabé chante avec vous ce poème, qui est né, non de son inspiration poétique mais de son engagement révolutionnaire à dire ce qu’il pense :

« Les impérialistes rôdent.

Des profondeurs de la terre embrasée,

Montent les clameurs d’un peuple décidé.

Car chaque jour est un jour de lutte.

De combats qui annoncent pour l’ennemi sa chute.

Mais qu’il est lourd le prix à payer !

Que de flots de sang, il faut chaque jour verser !

Des mères ont pleuré leurs enfants morts au front.

Des enfants ont enterré leur père à tâtons.

Dans cette obscurité des contras (contre-révolutionnaires), des bébés ont perdu leur biberon.

Ils ont empoigné la Kalachnikov à la place et se sont retrouvés garçons.

Les voiles blancs des mariées ont été tachés de sang’. Des prêtres patriotes y ont vu un signe des temps. Qu’il est difficile de vivre libre et être nicaraguayen ! Comme il est doux de mourir pour ses frères humains.

Nicaragua vaincra ! Déjà le peuple sait lire. Il écrit et se soigne, cultive ses champs et redécouvre le sourire.

La révolution triomphera ! Pour les contras : no pasardn !

Votre terre, notre terre, connaîtra grâce à notre génie la vraie manne.

À côté du Nicaragua il y aura le Burkina.

Car la révolution est invincible et le peuple régnera. Alors des profondeurs de la terre suave et embaumée Monteront les clameurs fraternelles de la symphonie achevée ».

C’est pour toutes ces raisons camarades, que j’ai l’honneur et le plaisir de vous remettre au nom du peuple burkinabè, un symbole de sa fierté à voir égard.

La patrie libre ou mourir !

La patrie ou la mort, nous vaincrons !

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